La route quitte le rivage et s'enfonce dans une passe étroite envahie par un lac. Elle sinue, s'encaisse, grimpe et descend, se borde de fuschias et de rhododendrons aux belles fleurs violettes, s'encombre de moutons guidés par de fiers béliers cornus, de tas de briquettes de tourbe qui attendent l'âtre.
Bien équipés, nous commençons d'un pas alerte l'ascension du Croagh Patrick ; l'honnêteté nous oblige à préciser que le pas perdit un peu de sa superbe après le premier raidillon. Quelques hectomètres plus haut, Saint Patrick n'ayant pas daigné nous saluer en enlevant sa casquette de nuages , nous le snoberons en nous arrêtant lorsque la visibilité sera presque nulle. Mais qu'a-t-il fait durant ces quarante jours ? Il a bien pensé à chasser tous les serpents de l'île d'Irlande, mais les nuages et la brume, il y a pensé ? Pourtant le vent, un vent à délainer les moutons, aurait dû l'aider dans cette tâche.
Revenus au niveau de la mer, nous observons un vaisseau statufié transportant de macabres squelettes rappelant la Grande Famine. Ce même cataclysme évoqué dans la vallée traversée ce matin où périrent 600 personnes coincées dans ces montagnes, chassées et repoussées par les propriétaires anglais.
Quand on aime, on ne compte pas et l'on est revenu au bout de cette même vallée perdue où nous avons passé la nuit dernière. Et Saint Patrick voudrait-il se venger de notre manque de dévotion en nous enveloppant dans une grisaille monotone ?
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